« L’amour pour toutes les créatures vivantes est le plus noble attribut de l’Homme » – Charles Darwin
Comme chaque année à la même période, on risque de voir pulluler dans les médias, quantités de brèves et de flashs-infos, relatant avec le même ton oppressant, ce qui est arrivé à ce pêcheur à Maui, à ce baigneur en Floride ou à ce surfeur à la Réunion. Des lignes qui s’accorderont toutes à décrire le coupable comme un tueur froid, cruel et sanguinaire, prétendument amateur de chair humaine, un coupable répondant au nom de requin.
Dans nos cultures populaires, le requin a mauvaise réputation, très mauvaise réputation.
La faute entre autres, à la littérature classique, Jack London Le loup des mers, mais surtout à des films tels que Les dents de la mer, dont l’héritage est en train d’être ravivé auprès des nouvelles générations, avec la sortie cette année de The Shallows. Le genre d’œuvres cinématographiques qui, dans la vraie vie, ont tendance à désensibiliser l’opinion publique au sort des squales. Pourtant, au-delà de leurs attaques, ces êtres sont mal connus et très souvent maltraités.
Personnellement, j’adore les requins. Le requin gris de récif est de loin mon préféré. Les squales exercent un véritable magnétisme chez moi. Ils m’émerveillent. Des documentaires tels que Sharkwater de Rob Stewart ou Planète Océan de Yann Arthus-Bertrand, en nous les présentant sous un autre jour, m’ont permis d’en apprendre plus sur eux, et de me rendre compte à quel point ces animaux étaient exceptionnels. J’aime leur grâce et la façon qu’ils ont de se mouvoir dans l’eau. Je dois reconnaitre que, moi qui déteste ne pas avoir pied en mer et qui suis pétrifiée par l’immensité bleue-noire des fonds-marins, je rêve secrètement de pouvoir en observer dans leur milieu naturel, sans cage, sans rien.
J’ai souvent remarqué que, lorsqu’on dit qu’on aime les requins, on nous demande irrémédiablement après si on n’en a quand même pas un peu peur.
Affirmer tout-de-go que non, serait mentir; mais en même temps, je ne donne pas dans la psychose. Alors bien sûr, si un jour je devais me retrouver en compagnie de l’un d’eux, quel qu’il soit, j’aurais de l’appréhension, sûrement peur; encore plus si je n’y étais pas préparée. Car soyons réalistes, le fait de les aimer ne m’immuniserait en rien d’une attaque. C’est tout aussi vrai lorsque cela concerne un requin, qu’un éléphant ou un hippopotame. Pourtant, l’opinion publique est nettement plus soucieuse du sort de ces derniers, bien qu’ils attaquent et tuent plus que les squales.
Les gens qui aiment les requins disent souvent que ce sont des animaux timides. Pour ma part, j’estime que c’est en parti vrai, mais également en parti faux. Selon moi, suivant leur propre caractère, ils peuvent être beaucoup de choses: timides, curieux, craintifs, agressifs… Ce sont tout simplement des animaux sauvages, qui répondent à une des lois fondamentale de la nature : s’alimenter et défendre leur habitat s’ils le sentent menacé. Dès lors, ces superprédateurs et nageurs hors-pair, feront ce qu’ils auront à faire.
A travers cet article, je tenais moi aussi à apporter ma pierre à l’édifice, en partageant avec vous, quelques faits intéressants, parfois surprenants, à propos de ces seigneurs des mers. J’estime qu’à l’heure actuelle, où ces animaux vieux de 400 millions d’années se retrouvent menacés d’extinction, il est utile et primordial de les présenter sous un autre angle que celui de leur appétit cruel et de leur amour pour le sang. Ils ne sont pas que ça.
Voyager c’est l’opportunité d’aller à la rencontre d’autres cultures et de traditions, mais c’est aussi l’occasion d’en apprendre plus sur la faune locale face à laquelle on peut être confronté.
Alors, peu importe qu’on les voit timides, féroces, terrifiants ou stupéfiants, les requins n’en demeurent pas moins des animaux marins remarquables, dont l’équilibre des océans dépend grandement, et dont nous dépendons tout autant.
12 faits intéressants à propos des requins
1 – Il existe 400 différentes espèces de requins. Le plus petit est le requin nain (15 cm), et le plus grand est le requin baleine (12 mètres en moyenne) qui ne se nourrit que de plancton. Il existe des requins dans pratiquement tous les océans et toutes les mers du globe. Le requin du Groenland affectionne les eaux polaires de l’Atlantique et du Pacifique Nord. D’autres, tels que le requin bouledogue, peuvent aussi bien évoluer dans l’eau de mer que dans l’eau douce des rivières (Amazone, Mississippi, Lac Nicaragua).
2 – Les requins possèdent plusieurs rangées de dents qui se renouvellent en permanence. Elles sont mobiles et indépendantes. On estime qu’un grand requin blanc possède en moyenne 300 dents. Tous les squales n’ont pas la même forme de dents; cela dépendant en grande partie de leur régime alimentaire.
3 – Si certains requins s’acclimatent à la vie en captivité, le requin blanc n’y parvient pas, refusant de s’alimenter et préférant se laisser mourir. Animal plutôt solitaire, il a besoin de chasser ses proies vivantes et de grands espaces pour se mouvoir.
4 – Grâce au phénomène de parthénogenèse, certaines femelles requin sont capables de donner naissance sans avoir été fécondée par un mâle.
5 – Le requin tigre est cannibale. Au stade embryonnaire déjà, dès qu’ils développent des dents, ils se dévorent entre eux, ne laissant pour survivant que le plus fort.
6 – La mâchoire des requins n’est pas attachée au crâne. Cela leur permet lors d’attaques de projeter leur mâchoire pour plus d’efficacité et de puissance.
7 – Le requin renard utilise sa longue nageoire caudale pour assommer ses proies.
8 – Les requins façonnent les océans. Ils chassent et attaquent les animaux blessés et malades, ils nettoient les océans des carcasses d’animaux morts et régulent les populations de quantités d’animaux marins en les chassant. C’est le cas des maquereaux mais également des rascasses volantes (poisson lion) véritable catastrophe écologique aux Antilles. Cette espèce invasive se nourrit des poissons de la Caraïbe, et met peu à peu en danger la faune et la flore marine locale. Cette situation a des répercussions également économiques, puisque cela met à mal l’activité des pêcheurs. Sans la présence de requins, qui commencent à les inclure à leur régime alimentaire, le désastre écologique pourrait être pire. Sans requins, quantités de poissons sans prédateurs majeurs, s’en donneraient à cœur joie pour se nourrir des coraux. Or, le corail absorbe le carbone, un gaz hautement responsable du réchauffement climatique.
9 – 100 millions de requins meurent par an. Cela peut être aussi bien dû à la pollution qu’à la perte de leur habitat ou au fait qu’ils se retrouvent prisonniers de filets de pêche. Certains serviront à alimenter le marché des cosmétiques, quand d’autres (un chiffre estimé à 73 millions), serviront à approvisionner le commerce illégal d’ailerons. Ces parties-là du squale sont utilisées dans la préparation de la soupe d’ailerons, un plat traditionnel de la cuisine asiatique. Les ailerons n’apportent aucun goût mais de la texture au plat. La soupe est servie lors d’événements mondains importants et tout grand chef en Chine est tenu de savoir la préparer. Elle aurait des vertus thérapeutiques. Chaque jour des milliers de squales sont dépossédés vivants de leurs ailerons avant d’être relâchés en mer. Privés de cet élément vital, ils couleront inévitablement et périront d’une mort lente. C’est un marché juteux qui rapporte beaucoup: 1kg d’aileron vaudrait 700 euros. Le gâchis engendré (seuls les ailerons sont prélevés et ils ne représentent que 7% du corps de l’animal), la technique de chasse et la surpêche sont autant de problèmes liés à cette pratique ; une pratique favorisée par une demande en forte croissance.
10 – Les requins possèdent des paupières mais ne clignent jamais des yeux, même lors d’une attaque. Certaines espèces comme le requin blanc peuvent alors rouler leurs yeux vers l’intérieur afin de les protéger.
11 – Les squales ont 6 sens. La vue, le goût, l’odorat le toucher, et l’ouïe. Le sixième permet de détecter les champs électromagnétiques grâce aux ampoules de Lorenzini présentes sur leur museau.
12 – Aujourd’hui le requin est fortement menacé d’extinction.
Alors oui, les requins peuvent mordre, attaquer et tuer, c’est un fait. Certaines règles permettent d’ailleurs de minimiser ce type de situation (ne pas nager au lever ou au coucher du soleil, éviter de se baigner dans des eaux troubles ou après de fortes pluies, ne pas rester à proximité des embarcations de pêcheurs, éviter les maillots de bain de couleur vives…) sans pour autant s’en prémunir à 100%.
Mais bien souvent on oublie que ces côtes et ces profondeurs marines que l’on pollue et que l’on s’auto-attribue, sont aussi leurs seuls habitats possibles.
La pêche intensive illégale, le réchauffement des eaux, les déversions de carcasses d’animaux dans les océans ont contribué à modifier les zones de prospection de ces prédateurs. Les activités touristiques de type plonger dans une cage auprès d’un grand requin blanc, participent également à la modification de leur comportement à notre égard. Dans le but de les attirer et de les exciter, afin que les touristes en cage puissent en avoir pour leur quota niveau sensations, du sang et des appâts sont jetés à la mer. Malheureusement ils ne constituent pas un véritable repas duquel un requin puisse se satisfaire. Le problème est que cette opération est répétée plusieurs fois par jour, plusieurs fois par an.
Si vous souhaitez aller plus loin et que le sort des requins vous préoccupe, voici quelques associations dont le travail pourrait vous intéresser:
Crédit photos requins baleines, les autres sont les miennes:
Marianna Tombini
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